Santé : trois questions adressées au maire de Tours

Dans une lettre adressée au nouveau maire de Tours, en date du 15 décembre 2017, l’association « C’est au Tour(s) du Peuple » (CATDP) l’interpellait dans son rôle de président du conseil de surveillance du CHRU. Malgré de nombreuses relances, il n’a, à ce jour, toujours pas répondu. Nous la lui renvoyons donc régulièrement et nous le ferons jusqu’à ce qu’il daigne respecter les règles élémentaires du dialogue avec ses concitoyens.

Voici, d’abord, cette lettre dans son intégralité :

Monsieur le Maire,
 
En tant qu’ancien membre de l’équipe municipale de M. Babary et nouveau maire de notre Ville, vous devez être au courant du mécontentement légitime et grandissant des habitants de Tours et alentours quant à la situation et l’avenir de l’hôpital public.
 
Solidaire des nombreuses actions déjà menées en la matière par l’Intersyndicale du CHRU de Tours et le Collectif Santé 37, notre association, C’est au Tour(s) du Peuple (CATDP), souhaite aujourd’hui vous exposer brièvement les raisons de ce mécontentement et vous adresser trois questions auxquelles vous aurez à cœur, nous n’en doutons pas, de répondre avec précision.
 
Les raisons du mécontentement
 
Depuis plusieurs décennies, les politiques de santé publique sont, en France et dans le monde, de plus en plus soumises à une logique comptable qui, sous couvert de performance et de modernisation, nuit gravement aux conditions de travail des personnels de santé et à la qualité des soins prodigués aux patients de l’hôpital.
 
Avec la mise en place au niveau national, en 2013, du Comité interministériel de performance et de modernisation de l'offre de soins (COPERMO), puis en 2017 du projet d’investissement immobilier « Horizon 2026 » du CHRU de Tours validé par ce même comité, cette logique s’est accélérée.
 
Plusieurs décisions, contestables et dangereuses, ont été prises et sont d’ores et déjà appliquées ou en voie de l’être. Il s’agit notamment de :
- la disparition de l’Hôpital pour enfants de Clocheville à Tours-Centre, de l’EHPAD L’Ermitage à Tours-Nord et de la Clinique Psychiatrique Universitaire (CPU),
- la suppression de 400 postes de personnels soignants, d’agents contractuels travaillant dans les domaines administratif, logistique, technique, hôtelier, etc.
- la fermeture de 370 lits d’hospitalisation.
 
Il résulte de ces décisions toute une série de situations concrètes dont nous avons été, soit directement témoins, soit dont de nombreux professionnels ou usagers de l’hôpital se sont faits l’écho. Il s’agit notamment de :
- la multiplication, pour l’immense majorité des personnels, d’horaires intenables, d’actes chronométrés, de conditions de stress en tout genre, par lesquels « l’anormal » s’installe dans le quotidien de l’hôpital,
- l’envoi, en raison du manque d’effectifs, de certaines catégories de personnels, telles que les infirmières, dans un autre service de soins que le leur, et ceci sans aucune préparation, ni formation suffisante,
- l’apparition répétée, lors d’épisodes épidémiques, de grippe par exemple, de véritables situations de crise où les personnels, en dépit de leur dévouement, ne peuvent plus faire face à l’afflux des malades,
- la dégradation constante de l’accueil et du soin des patients. Ceux-ci doivent rester souvent des heures, voire parfois plusieurs jours, aux urgences, en attendant qu’un lit se libère dans les services. Dans certains services, des malades sont allongés sur des matelas à même le sol faute de lits et il est aussi fréquent qu’au sortir de la salle d’opération, on ne sache pas où mettre le patient, faute là encore de lits, dits « d’aval ».
 
Trois questions
 
Face à ces projets autant que ces faits qui concernent l’ensemble de la population tourangelle, du département d’Indre-et-Loire et de la région Centre-Val de Loire, nous pensons qu’il est de notre devoir civique de vous alerter et de vous poser trois questions, tout à la fois complémentaires et de bon sens :
 
1) Ne sommes-nous pas placés, toutes et tous, face à une politique qui, au nom d’une prétendue optimisation des moyens, organise en fait délibérement le déclin de l’hôpital public afin de favoriser la privatisation de la santé ?
 
2) Vous avez, en tant que maire et donc président du Conseil de surveillance du CHRU de Tours, à veiller à l’application de l'article L. 6143-1 du Code de la santé publique, stipulant notamment que ce conseil doit donner son avis sur la politique d'amélioration continue de la qualité, de la sécurité des soins et de la gestion des risques ainsi que les conditions d'accueil et de prise en charge des usagers. A notre connaissance, votre prédécesseur, M. Serge Babary, n’a pas jugé bon de tenir compte des faits rappelés ci-dessus et s’est simplement contenté d’avaliser les directives du COPERMO et le plan « Horizon 2026 ». Que comptez-vous faire, pour votre part, maintenant que vous êtes devenu, à votre tour, président de ce Conseil de surveillance ? Allez-vous tout entreprendre pour que soit rétabli dans les plus brefs délais un fonctionnement normal de l’hôpital public garantissant à chacun, soignant ou patient, des conditions propres au respect dû à la personne humaine ?
 
3) Dans le dernier numéro de novembre-décembre 2017 du magazine municipal « Tours & moi » dont vous êtes le directeur de publication, une brève en page 11 a retenu notre attention. Sous le titre « CHRU : un fonds de dotation », on peut y lire : « Destiné à financer des projets pour améliorer l’accueil, la prise en charge, la qualité des soins, les conditions de travail au CHRU grâce au développement de l’innovation et de la recherche médicale, le fonds de dotation accepte les dons en ligne et par chèque. Chaque don permet une déduction d’impôt sur le revenu à hauteur de 66% du montant du don (limitée à 20% du revenu imposable) et de 75% pour les personnes soumises à l’ISF (dans la limite de 50 000€) – www.chu-tours.fr/mecenat ». Bien que vous ne portiez évidemment pas, en tant que maire, la responsabilité de ce dispositif d’exonération fiscale, nous aimerions connaître votre opinion sur la différence de traitement des contribuables qu’il organise.
 
Dans l’attente de votre réponse à ces trois questions, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Maire, l’expression de nos sentiments distingués.
 
C’est au Tour(s) du Peuple
 

Voici maintenant, en guise de «  bonus  », l’interpellation directe qu'a dû essuyer M. Bouchet, lors d'une réunion à la mairie en février 2018 :

C’est au Tour(s) du Peuple (CATDP)
15 mai 2018

Posts les plus consultés de ce blog

Lettre ouverte aux autorités compétentes en matière d’enseignement scolaire et de la petite enfance

Les membres de l’association C’est au (Tour)s du Peuple sont très inquiets de l’évolution récente de l’accueil des enfants. Cette inquiétude est aussi celle de la population, qui se manifeste par de nombreuses actions rendues publiques dans les médias locaux depuis septembre. Le contexte est même alarmant.

Au niveau national : révélations pendant l’année 2023 concernant les conditions d’accueil des jeunes enfants en crèche et, plus récemment, celles dévoilant le non respect de la loi dans certains établissements scolaires privés sous contrat comme en témoignent les cas les plus récents des établissements Averroès à Lille et Stanislas à Paris / préparation de la rentrée 2024 par le ministère de l’Éducation nationale.

L’actualité de l’école est très préoccupante. La Ministre Oudéa Castera a eu le mérite de mettre en lumière le séparatisme social de la bourgeoisie et la mainmise des églises sur l’école privée avec de graves dérives. S’y ajoutent les scandales ds crèches privées. Dans un contexte de manque de moyen pour l’école publique, les enseignant.es expriment leur colère. C'est dans ce contexte que les membres de l’association C’est au (Tour)s du Peuple ont adressé la lettre ouverte suivante aux autorités compétentes en matière d’enseignement scolaire (code de l’éducation) et de la petite enfance (code action sociale et famille).

Lettre ouverte aux autorités compétentes en matière d’enseignement  scolaire (code de l’éducation) et de la petite enfance (code action sociale et famille)

Objet : demande d’information sur la situation inquiétante des enfants scolarisés en Indre-et-Loire, en particulier à Tours, et des enfants de moins de trois ans accueillis dans les établissements privés sous et hors contrat, et dans les établissements publics

 

Monsieur Patrice Latron, Préfet d’Indre et Loire,
Monsieur Gilles Halbout, Recteur de l’académie Orléans Tours
Monsieur Christian Mendivé, Dasen d’Indre et Loire
Monsieur Emmanuel Denis, Maire de Tours

Tours le 20 février 2024

Messieurs,

Les membres de l’association C’est au (Tour)s du Peuple sont très inquiets de l’évolution récente de l’accueil des enfants. Cette inquiétude est aussi celle de la population, qui se manifeste par de nombreuses actions rendues publiques dans les médias locaux depuis septembre. Le contexte est même alarmant.

Au niveau national : révélations pendant l’année 2023 concernant les conditions d’accueil des jeunes enfants en crèche et, plus récemment, celles dévoilant le non respect de la loi dans certains établissements scolaires privés sous contrat comme en témoignent les cas les plus récents des établissements Averroès à Lille et Stanislas à Paris / préparation de la rentrée 2024 par le ministère de l’Éducation nationale.

Au niveau local, une série d’évènements ponctuels depuis la rentrée 2023 alertent : hausse du nombre d’enfants sans abri / fermeture puis réouverture de mini-crèches à Tours / multiplication des familles pratiquant ou souhaitant pratiquer l’école à la maison / croissance des effectifs en établissements privés / fermeture par la préfecture d’un lieu d’enseignement coranique rue Ch. Colomb / suppression de plusieurs dizaines de classes dans l’enseignement public programmée en Indre-et-Loire pour septembre 2024.

C’est au Tour(s) du Peuple vous demande, dans le cadre de vos compétences, des réponses aux questions suivantes présentées sans ordre d’urgence car elles sont toutes urgentes, cruciales :

  • Un état des lieux récent de l’accueil public, privé, associatif des très jeunes enfants est-il disponible ? Ou bien est-il en cours et si oui, à quelle échéance ?
  • Quel est le chiffrage du financement de l’enseignement privé sous contrat par des fonds publics à Tours et en Indre-et-Loire ?
  • Quels contrôles ont été effectués et à quelles dates dans les établissements privés – sous et hors contrat – sur le respect de la mixité filles/garçons, y compris les détournements comme les classes partagées en deux espaces distincts (loi de 1976) et le respect de la mixité sociale (loi Debré, 1959).
  • Quelle est la place de l’enseignement religieux dans les établissements confessionnels : respect de la loi ou bien obligation déguisée, contenus sexistes, discriminatoires, infamants sous couvert de foi religieuse ? Dispositif d’alerte existant ou non pour les cas de mal-traitance des enfants ?
  • Comment est suivi le droit à l’enseignement des enfants « scolarisés à la maison » : contrôle des demandes en amont et inspection pédagogique sur les contenus enseignés dans les familles en aval (code de l’Éducation art. 131).
  • Pour l’enseignement public, il faudrait une présentation plus claire et prospective du projet rectoral à propos de l’enseignement artistique en classes Cham/Chad pour répondre aux inquiétudes légitimes et des familles et des collèges concernés (Francis Poulenc, Michelet, Anatole France). Et surtout reconsidérer totalement les fermetures de classes : 38 en Indre-et-Loire, 5 à Tours centre. Alors que 20% des habitants la ville de Tours vivent en-dessous du seuil de pauvreté (France 14%), la hausse des effectifs par classe hypothèque gravement la scolarisation des enfants en difficulté sociale et de logement, et casse les initiatives d’inclusion les enfants handicapés (autisme, etc.).

Merci de votre attention et vos réponses.

Recevez nos associatives salutations.

L’association C’est Au Tour(s) Du Peuple

Lettre écrite et délibérée collectivement par les adhérent(e)s
Coordonnées : Association C’est Au Tour(s) Du Peuple C/ Serpent Volant, rue du Grand Marché 37000 Tours – cautoursdupeuple@gmail.com

Cette lettre ouverte est communiquée au député Charles Fournier, aux médias, aux syndicats et aux associations. Elle est publiée sur nos réseaux sociaux. Les réponses le seront aussi.

.

Nouvelle-Calédonie, Mayotte … le colonialisme comme fil conducteur. Pas en notre nom !

La colonisation est le cœur de la politique française en Nouvelle-Calédonie. En confortant la place des colons, leur installation avec maints avantages, la spoliation des terres et des ressources, le maintien dans la pauvreté et la dépendance d’une grande partie du peuple Kanak.

L’ONU a inscrit en 1986 la Nouvelle-Calédonie sur la liste des pays à décoloniser. En 1988, après une période violente qui s’était soldée par 90 morts, les accords de Matignon puis de Nouméa avaient ouvert la voie à un processus de décolonisation, avec le transfert progressif des compétences que l’État avait créées pour sa domination, vers une pleine émancipation.

Ces accords ont été sans cesse menacés par les gouvernements français et par les colons. Mais le pays a vécu dans la paix. Emmanuel Macron a initié un vrai torpillage de ce processus. Il a imposé la tenue d’un référendum dans la période du Covid et a nommé au gouvernement une dirigeante politique extrémiste, représentante des colons (Sonia Backès), pour aboutir à cette fameuse loi sur le « dégel du corps électoral » qui donnerait le droit de vote sur les questions calédoniennes aux nouveaux colons arrivés ces 10 dernières années. Le rapporteur désigné pour porter cette loi est lui-même député représentant des colons !

Emmanuel Macron et son ministre policier, Gérald Darmanin, nous ramènent 40 ans en arrière en provoquant des violences, laissant les colons organiser des milices meurtrières, criminalisant toute forme de protestation. Comme à l’accoutumée, de nombreux médias reprennent les termes officiels du gouvernement appelant la colère des émeutes et la jeunesse kanak des voyous, ciblant une partie du mouvement indépendantiste pour le rendre responsable de la situation. Pourtant, de nombreuses voix, diverses politiquement, qui connaissent la Nouvelle-Calédonie et ont suivi le processus engagé, ont alerté le gouvernement sur la gravité des affrontement politiques qu’il allait déclencher.

Les seuls responsables sont donc la macronie, son chef, ses soutiens, les colons et leurs représentants de droite et d’extrême droite, qui n’hésitent pas a créer des milices armées.

En Nouvelle-Calédonie, à Mayotte, dans tous les territoires ultramarins, nos dirigeants maintiennent une domination de classe et raciste, une exploitation hors norme, des violences d’État au nom de « monopole de la violence légitime » qui se traduit par la préservation d’un ordre venu d’un autre âge de notre histoire. Son nom ? Le colonialisme ! Et dans ce domaine, les droites rassemblées autour de Macron portent une terrible responsabilité historique.

En Nouvelle-Calédonie, il faut reprendre le processus de décolonisation, retirer ce projet de loi inique, arrêter de soutenir les colons, écouter le peuple pour une coexistence pacifique et égalitaire. Stoppez la répression d’exception.

À Mayotte, il faut rétablir la loi républicaine pour une égalité des droits pour tous, retirer les lois d’exception et ouvrir un dialogue régional avec les anciens pays colonisés de la zone océan indien.

Il faut enfin cesser d’utiliser les territoires ultramarins comme des laboratoires avancés de gouvernement autoritaire, de remise en cause des principes républicains comme le droit du sol, de nouvelles formes de guerre aux pauvres, de criminalisation des jeunesses…

Il faut cesser de parler en notre nom ! Le peuple français a déjà dit non à la colonisation !

C’est Au Tour(s) Du Peuple
Tours, juin 2024